L’INJS : un lieu tourné vers l’inclusion des jeunes sourds
L’INJS : un lieu tourné vers l’inclusion des jeunes sourds
En France, 6 millions de personnes sont malentendantes. Parmi elles, des enfants qui, pour suivre une scolarité adaptée, peuvent être accueillis à l’Institut national de jeunes sourds (INJS) de Paris. Ce lieu unique, qui fait de l’inclusion une réalité, nous a ouvert ses portes.
Entrer dans une salle de classe à l’Institut national de jeunes sourds de Paris, au cœur du cinquième arrondissement de Paris(1), c’est comme entrer dans n’importe quelle salle de classe. À quelques détails près… Au lieu d’être trente, les élèves sont six ou sept, tous tournés vers leur enseignant qui s’exprime en langue des signes française (LSF). Branka, 15 ans, est la dernière de sa fratrie à suivre sa scolarité à l’INJS. Sourde de naissance, elle termine sa 3ème sereinement : « Les classes en LSF, c’est vraiment ce dont j’ai besoin, signe-t-elle. Je peux communiquer directement avec l’enseignant et ça fait toute la différence, je me sens à l’aise à l’INJS. » Placé sous l’égide du Ministère du Travail, de la Santé et des Solidarités, l’INJS accueille des jeunes sourds de 3 à 20 ans. « Notre mission consiste à assurer l’enseignement, l’éducation et le soin de ces enfants en vue de leur donner les clés de l’autonomie pour qu’ils trouvent leur place dans une société d’entendants », précise Paul Flad, le directeur de l’établissement.
Un lieu unique au carrefour du soin et de l’enseignement
Si les élèves de maternelle et de primaire inscrits à l’INJS sont en réalité scolarisés en milieu dit « ordinaire » avec l’aide et l’accompagnement de l’Institut, ce dernier accueille en son sein des élèves à partir de la 6ème et propose sept CAP qui préparent les jeunes à un métier. Et l’INJS n’est pas seulement un établissement scolaire… C’est aussi un lieu de soin doté d’un plateau technique composé d’orthophonistes, psychologues, psychiatres, médecins ORL, psychomotriciens, infirmières, et un lieu de vie composé d’un internat de 90 lits encadré par des éducateurs, d’un magnifique parc, mais aussi d’équipements sportifs. Le tout, mis gratuitement à disposition des élèves, principalement franciliens(2). « Au début, j’avais besoin de séances de psychomotricité mais ce n’est plus le cas, précise Branka. Je sais que tous les soins sont disponibles à l’INJS, c’est vraiment pratique ».
Une prise en charge collective pour une réponse individuelle
À l’INJS, certains élèves ont besoin de nombreux soins car ils présentent des handicaps et/ou troubles associés ou non à la surdité, d’autres n’y vont que pour leur scolarité, d’autres encore passent la majeure partie de leur scolarité au sein de l’Institut tandis que certains sont assez autonomes pour bénéficier d’incursions en milieu ordinaire. Chaque élève suit donc un projet individuel en fonction de ses besoins, de ses possibilités, de son choix linguistique et de la nature de son handicap. Ce projet évolue au fil du temps en fonction de l’enfant. « Quel que soit le projet individuel de chacun, l’INJS est le port d’attache, le repère des jeunes qui s’y sentent chez eux, ajoute Paul Flad. Ce n’est pas contradictoire avec leur inclusion dans la société, bien au contraire : c’est une condition de leur réussite. »
Des projets qui donnent des ailes
Théâtre, escalade, voyages… l’INJS pratique le « mode projet » avec les élèves. Cela consiste à rassembler les forces multidisciplinaires autour d’objectifs communs qui favorisent l’ouverture et l’intégration. « Grâce à l’INJS, nous avons pu aller à Londres, à Chambéry, en Pologne…, raconte Branka. Des expériences très fortes ! Grâce à la langue des signes internationale que je pratique un peu, j’ai pu échanger avec de jeunes sourds polonais et on a pu comparer nos cultures, c’était génial. » Et si, comme le dit Paul Flad, « tout est une question de moyens », la mobilisation des équipes de l’INJS, elle, fait (tout) le reste. « En tant qu’enseignant, on ne sait pas forcément pourquoi on entre à l’INJS mais on sait pourquoi on y reste, confirme Karine Fouet, professeure spécialisée au sein de l’INJS de Paris depuis 2005. Même si les parcours de vie de nos élèves sont parfois compliqués, que le travail avec eux demande beaucoup de préparation, l’Institut nous forme en permanence et nous avons toutes les ressources à disposition pour bien accompagner les élèves et faire en sorte qu’ils aient la meilleure vie possible. » Un objectif que partage Branka : « Pour la suite, je vise un bac pro Esthétique parce que mon rêve serait d’ouvrir mon propre salon. D’ailleurs, j’ai un message pour vos lecteurs entendants : chez les sourds, le mot « impossible » n’existe pas ».
Chloé Dussère
(1) 254 Rue Saint-Jacques, Paris 5ème
(2) Hors Île-de-France, il existe trois autres instituts dédiés aux jeunes sourds à Bordeaux, Chambéry et Metz.