"Il faut relativiser par rapport à ces conflits"
"Il faut relativiser par rapport à ces conflits"
La guerre est un sujet difficile à aborder avec son enfant puisque qu’il peut rapidement devenir une source d’angoisses. Tsipora Heymann, psychologue clinicienne de l’enfant, de l’adolescent et de la parentalité nous livre ses conseils pour parler de guerre à son enfant. Propos recueillis par Alice Boucher.
Interview :
Vdf : Cela fait plus d’un an que le conflit Ukraine-Russie est au cœur de l’actualité mondiale. Comment fait-on pour en parler avec son enfant sans lui faire peur ?
Tsipora Heymann : On commence par lui poser des questions : ‘’Est-ce que t’as compris ? Cela t’a fait peur ? Tu veux en parler, que je t’explique ? ‘’. Il faut savoir où l’enfant en est par rapport à ce sujet. Des grands vont plus s’intéresser aux détails, à la compréhension des choses tandis que les plus petits vont plus s’attarder sur le sensoriel et l’émotionnel. Contrairement à un adulte, il faut prendre plus de précautions pour ne pas éveiller des peurs de violence, de se faire tuer, etc. C’est important de situer les choses dans la réalité. Il faut relativiser par rapport à ces conflits : on peut lui donner des éléments sur ce que la France fait pour nous protéger de la guerre.
Quels sont les premiers rapports qui s’établissent entre l’enfant et la guerre ?
L’enfant va avoir des bribes d’informations par les médias, les copains ou autre : une idée vague va forcément rentrer dans sa tête. Le poids des mots et le choc des photos sur la guerre ne permettent pas à l’enfant de construire quelque chose de logique, c’est là que cela peut devenir anxiogène. À partir de 2 ans, on peut déjà l’accompagner, faire attention à ce qu’il voit et entend. En reparler, peu importe le degré d’information, est la solution sans forcément donner des détails surtout aux plus jeunes. À l’école, on effectue un travail d’information sur le sujet, mais il n’est pas suffisant pour la gestion émotionnelle. Il va plus décrire les cadres historiques, politiques, géographiques des conflits. Si l’enfant nous raconte ce que dit le maître, il faut rebondir dessus et gérer ses angoisses.
En lien avec l’actualité du conflit Ukraine-Russie, voyez-vous des changements dans leur comportement ?
Récemment, les enfants ont craint surtout la Covid : c’est un événement intense pour eux. Ils étaient aussi anxieux par rapport aux attentats qui ont eu lieu à Paris. Je pense que les changements ne les impactent pas forcément dans l’immédiateté, mais c’est plus tard que ça se joue : avec le temps, ils développent des émotions et des sentiments.
Quels sont les troubles qu’il peut développer face à ces situations anxiogènes ?
Cela joue sur son état émotionnel : du mal à dormir, manque d’appétit, troubles physiologiques. Autant de signes qui doivent peut-être le conduire à consulter un thérapeute. Ce n’est pas toujours évident pour lui de cibler une peur, ce sont des émotions vagues : il y a un travail de recherche à faire.
À chaque âge sa gestion. L’attitude de l’adulte va donner la tonalité du sentiment de sécurité de l’enfant.
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